Réflexions sur les Allocations familiales

Ne touchez pas aux Allocations familiales !

Cyril Benjamin CASTRO  –  Février 2013

 

La crise doit nous forcer d’avoir un faible pour mettre en exergue nos atouts et nous donner la force de corriger nos faiblesses.

 

La politique familiale à la française est une réussite. Notre démographie, pas seulement due à notre immigration, le montre. Avec 2,03 enfants par femme en France, contre 1,3 en Allemagne, chiffre stable depuis 30 ans, notre vitalité nataliste se maintient en haut des classements en Europe. Dans 15 ans nous seront plus nombreux que les Allemands. Déjà, notre pays compte à ce jour 16 millions de moins de 20 ans, contre 10,5 chez nos voisins d’outre-Rhin.

 

Mais au-delà des chiffres c’est tout un état d’esprit volontariste qui nous anime. L’état d’esprit consensuel pour une politique familiale forte et évidente. Une mère qui travaille n’est pas culpabilisée par ses collègues, contrairement à ce qui se passe chez nos voisins allemands, pour qui une femme doit choisir entre carrière et enfant en bas âge.  De plus en plus de pères s’occupent de leurs enfants, au-delà du mariage, y compris après la séparation d’avec la mère. Cette implication plutôt nouvelle marque l’ancrage de plus en plus grand de l’esprit de famille moderne. Sans même parler du mariage pour tous qui, parce que dès le départ ses promoteurs l’ont à juste titre appelé mariage – civil s’entend – impliquait non seulement l’union des personnes de même sexe mais aussi –et surtout- la volonté de faire famille. Les débats locaux organisés sur ce thème entre novembre dernier et aujourd’hui  ont bien explicitement mis en avant ce point.

 

A quoi est donc due cette volonté bien française pour la défense et l’encouragement de la famille, en ces temps modernes, jugés parfois moins solidaires ?

 

A une politique de maintien dans l’emploi des mamans ; A une politique appuyée au niveau local pour l’accueil des petits ; A la disponibilité des grands-parents de plus en plus présents et avec un taux d’inoccupation professionnelle des plus de 55 ans le plus fort d’Europe ; enfin à des incitations par le maintien élevé d’allocations familiales, non sacrifiées et en partie gage de la stable consommation des ménages durant les années 2008-2012…. Tout cela fait UNE politique, avec ses piliers incontournables.

Ce n’est certes pas pour 290 € par mois que l’on fait 3 enfants. Cependant l’effort de la nation pour financer ces 290 € marque l’engagement du pays aux côtés des familles. Ces sommes sont souvent indispensables surtout quand l’un des deux parents (le père ou la mère) se retrouve seul à élever les forces économiques de demain.

Faut-il alors toucher à l’un des éléments de notre politique familiale réussie parce que la crise et les inégalités s’accentuent ?

 

A priori la fiscalisation de ces prestations familiales –qui représentent 28 milliards sur les 50 redistribuées par les CAF, hors aide au logement, qui ne concerne pas que les familles- paraît juste.

 

Pourquoi donner autant à des familles à hauts revenus qu’à des familles modestes, voire pauvres ? Mais la réponse est plus complexe et il s’agit de ne pas casser les ressorts d’une redistribution bien acceptée.

En effet, chaque famille perçoit une allocation en fonction des enfants qui la composent et non pas en fonction de ses revenus. Cependant le financement des prestations familiales repose essentiellement sur les revenus (charges sociales). Donc les plus riches-en revenus- paient plus. C’est en cela que le système actuel est redistributif, tout en permettant une plus grande égalité à l’enfant. De plus la politique juste du plafonnement du quotient  familial permet aussi de limiter le « bénéfice effet enfant » pour les plus imposés et donc les plus riches.

 Fiscaliser les allocations familiales revient donc à prendre plus en amont aux plus favorisés et plus aussi en aval.

La baisse pour 3 enfants atteindra 1100 € par an (soit 16000 € sur les 16 ans de leurs versements)… Pas ruinant, pas dissuasif pour qui veut enfant, mais pas négligeable non plus !

Et que penser du foyer non imposable, qui le deviendrait si on taxe ses fameuses allocations, perdant du même coup les avantages liés à sa non-imposition actuelle ! Ce serait un quotient pour les plus modestes !

Attention… Pour devoir chercher des économies bien nécessaires, il faut néanmoins veiller  à ne pas casser ce qui marche pour aujourd’hui et demain : nos enfants paieront nos retraites demain, non ? Et consommeront  pour la bonne santé de notre économie, n’est-ce pas ?

Pour satisfaire un court-termisme  dévastateur, cherchons les économies où elles seront impactantes sur les comptes et négligeables sur les effets pervers. Cherchons dans les gabegies, les fraudes, les errements et tant d’autres domaines, mais pas en abîmant une politique nataliste jusqu’ici consensuelle…  Ne sacrifions pas une fois de plus demain pour aujourd’hui. D’autant plus que cela risque d’être une goutte d’eau qui fait déborder le vase de l’impôt et fera rompre le pacte fiscal –ténu- reposant sur le consentement raisonné, entre ceux qui gagnent et paient, et ceux qui globalement et pour un temps  reçoivent justement.

 

N’affaiblissons pas notre atout majeur, économique, européen, stratégique, qu’est notre politique globale de natalité, sinon nous risquons des déséquilibres inquiétants  que seule une immigration accrue –et plus mal acceptée en temps de crise- pourrait compenser…

…  Avis aux amateurs (qui nous gouvernent et ceux qui veulent les remplacer).